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Rétroaction

Boud et Molloy (2012) décrivent la rétroaction ou le retour réflexif comme un processus par lequel une personne apprenante obtient des informations sur son travail afin d’identifier les similitudes et les différences entre les normes de la tâche et les qualités de son propre travail, ce qui lui permet de produire des résultats de meilleure qualité. Cette définition met en évidence trois points essentiels :

  1. La rétroaction est considérée comme un processus et non comme une simple information reçue.
  2. Le rôle de l’apprenant dans la recherche d’informations est souligné, ce qui implique que la réception de la rétroaction n’est pas passive.
  3. La rétroaction n’est pas simplement une information sur la performance ; elle sert également d’outil pour améliorer des tâches similaires ou plus complexes par la suite.

La rétroaction traditionnelle, qui consiste souvent en des commentaires écrits ou oraux sur les tâches assignées aux étudiants, a longtemps été bénéfique tant pour les étudiants universitaires que pour leurs enseignants. Cependant, il comporte certaines limites, parallèlement à ses avantages :

  • La rétroaction est généralement fournie sur les travaux de cours, mais rarement sur les examens cruciaux de fin de semestre ou de fin d’année, qui ont un impact significatif sur les notes globales (Hounsell et al., 2007).
  • Les commentaires des enseignants se concentrent généralement sur la conformité du travail de l’élève à des critères et des normes spécifiques, mais pour les élèves dont les travaux ne sont pas à la hauteur, ces commentaires peuvent ne pas illustrer directement ce qu’implique un travail exemplaire. Pourtant, il est essentiel de comprendre ce qui constitue un excellent travail pour interpréter et appliquer efficacement les commentaires (Sadler, 1989).
  • Dans l’enseignement supérieur, la rétroaction se fait généralement après la fin du travail évalué, ce qui peut être déstabilisant pour les étudiants de première année, habitués à un soutien continu tout au long du processus de travail dans les contextes éducatifs précédents (Beaumont et al., 2011).
Une rétroaction formative

La rétroaction formative représente l’information communiquée à l’apprenant qui vise à modifier sa façon de penser ou son comportement dans le but d’améliorer l’apprentissage. Les informations contenues dans le retour peuvent porter sur l’exactitude d’une réponse à un problème ou à une tâche et peuvent également concerner des erreurs et des conceptions erronées particulières, ces dernières représentant des types de retour plus spécifiques ou plus élaborés (Azevedo & Bernard, 1995 ; Birenbaum & Tatsuoka, 1987 ; Cheng, Lin, Chen, & Heh, 2005 ; Cohen, 1985 ; Kulhavy, 1977 ; Sales, 1993 ; Sleeman, Kelly, Martinak, Ward, & Moore, 1989).

Pour être efficace, la rétroaction formative doit permettre de comparer la performance réelle à une norme de performance établie (Johnson & Johnson, 1993). La définition de rétroaction formative peut être affinée comme étant multidimensionnelle, non évaluative, de soutien, contrôlée par l’apprenant, en temps opportun, spécifique, crédible, peu fréquente, conditionnelle et authentique (par exemple, Brophy, 1981 ; Schwartz & White, 2000).

Une rétroaction collective

La rétroaction collective offre une solution pratique dans les situations où les enseignants n’ont pas le temps de fournir un retour individuel, par exemple lorsqu’ils gèrent de grands groupes d’étudiants ou qu’ils sont confrontés à des contraintes de temps. Cette méthode est souvent utilisée pour fournir des commentaires plus détaillés et plus élaborés, par exemple en abordant les idées fausses les plus courantes, en comparant ou en discutant des approches alternatives, ou en examinant des exemples probants et d’autres moins efficaces.

L’un des principaux avantages de la rétroaction collective est que les étudiants peuvent apprendre du travail de leurs pairs, ce qui leur permet d’avoir une vision plus large de ce qui est attendu d’eux. Cette approche encourage les élèves à comparer leur travail à celui des autres, ce qui les aide à développer leur capacité à s’auto-évaluer de manière constructive. Pour certains élèves, comparer leur travail à celui de leurs pairs peut sembler difficile au départ, mais le retour en groupe est généralement perçu comme moins intimidant que le retour individuel.

Cependant, l’inconvénient de la rétroaction collective est qu’elle n’aborde pas les erreurs ou les questions individuelles, ce qui le rend moins adaptée aux besoins de chaque étudiant. C’est pourquoi de nombreux élèves préfèrent un retour individuel. Néanmoins, l’objectif global de l’éducation est de fournir aux étudiants les compétences nécessaires pour travailler de manière indépendante, développer des capacités d’autocritique et apprendre à répondre efficacement au retour des experts et des pairs.

Exemplaires, réponses types et questions passées

Sadler (1989) affirme que pour que les étudiants puissent utiliser efficacement le retour, ils doivent avoir une bonne compréhension de ce qui constitue un travail exemplaire dans une matière, à un niveau académique spécifique.

Selon la définition de Huxham (2007), une réponse modèle est une réponse idéale à une question, générée par un tuteur, qui obtiendrait 100 % des points et qui est mise à la disposition de tous les étudiants participant à une évaluation. Les réponses types sont généralement élaborées par les enseignants. Huxham y voit plusieurs avantages :

  • Ils peuvent être donnés beaucoup plus rapidement que les commentaires individuels.
  • Ils n’impliquent pas de commentaires personnels de la part de l’enseignant (évitant ainsi les dangers d’un retour négatif).
  • Ils nécessitent un engagement actif de la part de l’élève qui doit lire son travail et le comparer au modèle de réponse donné.
  • Ils peuvent être explicitement liés aux critères de notation et aux objectifs d’apprentissage.

Huxham (2007) suggère que les réponses types sont plus efficaces lorsqu’elles sont associées à des commentaires individuels.

Contrairement aux réponses types, les copies types sont de véritables exemples de travaux d’élèves qui montrent ce que les pairs peuvent réaliser de manière réaliste, plutôt que de présenter une norme de perfection inatteignable. Selon Sadler (2002), les copies types transmettent des messages que d’autres méthodes ne peuvent pas transmettre, car elles ne se contentent pas de dire aux élèves ce qui constitue l’excellence, mais elles les montrent réellement. En outre, les copies types sont généralement diversifiées, offrant un éventail d’exemples qui illustrent un travail de grande qualité. Cette pluralité permet de répondre aux inquiétudes des enseignants qui craignent que le fait de ne fournir qu’un seul modèle de réponse ou d’exemple d’excellence n’encourage les élèves à imiter sans réfléchir plutôt qu’à faire preuve d’une véritable réflexion (Hounsell, 2008). Handley et Williams (2009) ont constaté que les élèves sont très réceptifs aux exemples.

Rétroaction anticipée (ou feedforward feedback)

La rétroaction, y compris les exemples, est souvent fournie après un examen ou après la remise d’un travail. Cependant, il peut également être proposée avant une activité, un processus connu sous le nom de « feedforward » (décomposition de feed-back; changer le dernier tronçon en le mettant en opposition avec forward qui en anglais signifie l’inverse de back) .

Dans l’enseignement de premier cycle, la rétroaction est généralement rétrospectif et indirectement lié à des actions futures. Les devoirs et les évaluations sont souvent concentrés vers la fin des semestres, ce qui fait qu’il est difficile pour les étudiants de déterminer quand et où la rétroaction peut être appliquée de manière efficace. Par conséquent, même un retour de haute qualité peut avoir un impact limité. En revanche, la supervision de la recherche post universitaire implique souvent un retour continu sur les projets, tels que les plans de recherche, les analyses des résultats émergents ou l’élaboration des chapitres de la thèse. Ces commentaires récurrents influencent directement les améliorations et les révisions, créant ainsi un effet de « feedforward ».

Pour pallier les limites de la rétroaction rétrospective, certains cours de premier cycle ont mis en place des « devoirs d’anticipation » qui établissent un lien clair entre le diagnostic et l’action corrective. Ces devoirs impliquent généralement une « boucle de rétroaction » récurrente, dans laquelle les étudiants soumettent un projet, reçoivent des commentaires, révisent leur travail et le soumettent à nouveau. Les projets peuvent prendre diverses formes, y compris des travaux complets ou presque complets, des ébauches ou des plans initiaux, des résumés détaillés ou des pages d’ouverture.

Les devoirs d’approfondissement offrent aux étudiants l’avantage d’une pratique à faible enjeu sur un travail évaluable tout en fournissant un retour exploitable afin d’améliorer les évaluations formelles subséquentes. Cependant, ces travaux peuvent exiger des délais plus courts, ce qui peut être difficile pour les étudiants qui ont d’autres engagements. Pour y remédier, la participation est souvent facultative plutôt qu’obligatoire. Par exemple, dans deux exemples de travaux d’approfondissement, environ la moitié des étudiants ont choisi de soumettre des projets pour obtenir une rétroaction (Covic et Jones, 2008 ; Prowse et al., 2007).

Rétroaction en ligne

Une autre façon de donner une rétroaction peut inclure l’utilisation de la technologie. La rétroaction en ligne est immédiate et les étudiants peuvent y accéder au moment de leur choix. Bien que le principal type de question utilisé soit généralement à choix multiples, il est également possible de concevoir des questions à réponses courtes (Jordan & Mitchell, 2009).

Les grilles d’évaluation

Une grille d’évaluation est un outil structuré qui décrit les critères d’évaluation d’un travail ou d’une tâche, avec souvent des niveaux de performance spécifiques décrits pour chaque critère. Les pro formas d’évaluation et de rétroaction, souvent appelés « pages de garde » ou « pièces jointes au devoir », sont largement utilisés pour fournir une rétroaction structurée et standardisée aux étudiants (Hounsell et al., 2007). Ces outils, qui se présentent généralement sous la forme de grilles d’évaluation, offrent plusieurs avantages importants :

  • Alignement sur les critères d’évaluation : Les grilles d’évaluation relient directement les commentaires aux critères d’évaluation, ce qui permet aux correcteurs de rester concentrés et d’assurer une évaluation cohérente de plusieurs travaux. Les étudiants bénéficient d’une compréhension claire de la manière dont les commentaires et les évaluations correspondent aux critères.
  • Cohérence entre les groupes de travail : Lorsque tous les correcteurs utilisent la même grille d’évaluation, la cohérence de la notation et de la rétroaction est améliorée, ce qui garantit l’équité et l’uniformité dans l’ensemble du cours.
  • Un retour équilibré : La combinaison des évaluations et des commentaires écrits permet aux correcteurs de fournir un retour à la fois complet et concis, équilibrant étendue et profondeur.
  • Suivi des progrès : Les grilles d’évaluation permettent aux élèves et aux enseignants de suivre les progrès au fil du temps en identifiant les points forts et les domaines à améliorer dans une série de travaux, ce qui facilite les efforts ciblés pour combler les lacunes.

Les grilles d’évaluation permettent non seulement de rationaliser le processus de la rétroaction pour les enseignants, mais aussi d’améliorer la capacité des étudiants à interpréter et à appliquer efficacement la rétroaction, ce qui favorise l’apprentissage et l’amélioration continus.

Références

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